RÉSEAU Janvier-février
2000 / Magazine de l'Université du Québec Reproduction autorisée avec la mention de l'auteur et de la source. |
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QUATRE DES DIX DÉCOUVERTES DE L'ANNÉE AU QUÉBEC, RÉPERTORIÉES PAR QUÉBEC SCIENCE, SONT NÉES À L'UQ
La science, qui a dans nos vies des conséquences innombrables, bénéfiques et souvent insoupçonnées, reçoit bien peu de reconnaissance et d'éloges en retour de ce qu'elle fait pour nous. Chaque année, le magazine Québec Science rend hommage aux chercheurs en sélectionnant dix découvertes parmi une cinquantaine de recherches réalisées dans les universités et les institutions scientifiques du Québec. Cette année, des équipes de l'UQAM, de l'UQTR, de l'UQAC et de l'INRS-Institut Armand-Frappier figurent parmi les scientifiques qui reçoivent ce témoignage d'excellence.
EN ENVIRONNEMENT, À L'UQAM, UNE DÉCOUVERTE SUR LE FER ET LE PHYTOPLANCTON QUI POURRAIT CONRIBUER À L'ÉQUILIBRE DES ÉCOSYSTÈMES ET DU CLIMAT
Il a été démontré que le fer est vital pour la santé des océans et l'équilibre du climat. Le fer est en effet essentiel à la photosynthèse du phytoplancton, ces algues microscopiques qui, d'une part, constituent la base de tout le réseau alimentaire marin et, d'autre part, absorbent de grandes quantités de CO2 atmosphérique dont l'accroissement est à l'origine du réchauffement climatique. Jusqu'à récemment, on croyait que le phytoplancton devait se contenter de la quantité de fer dissous dans l'eau. Mais trois chercheurs ont découvert qu'il en va autrement. David Bird, professeur de biologie à l'Université du Québec à Montréal, Roxane Maranger, une de ses étudiantes au doctorat et le professeur Neil Price, de l'Université McGill, se sont intéressés aux régions océaniques où le fer disponible est utilisé par des bactéries, ne laissant qu'une maigre pitance pour le phytoplancton. Mme Maranger et M. Price ont réussi à créer une culture de bactéries contenant du fer radioactif, sans aucune trace de fer dissous. Ils ont ainsi pu démontrer que dans les milieux marins très pauvres en fer, le phytoplancton a développé une autre façon de s'alimenter : les algues mangent tout simplement les bactéries qui ont déjà absorbé le fer disponible. Ces algues sont mixotrophes, c'est-à-dire qu'elles peuvent se nourrir par photosynthèse ou encore ingérer des particules de petite taille. De plus, après avoir assimilé seulement 30 % du fer contenu dans les bactéries, le phytoplancton mixotrophe rejette le reste sous une forme que d'autres organismes peuvent utiliser. Il joue ainsi un rôle important dans le recyclage du fer pour tout l'écosystème océanique et par conséquence, intervient dans la régulation du climat.
À L'UQTR, DES ÉTUDES EN ÉCOLOGIE RÉVÈLENT L'EXISTENCE DE DEUX FORMES DISTINCTES DE TRUITES MOUCHETÉES
Pierre Magnan et quelques étudiants, au Laboratoire de recherche sur les communautés aquatiques.
La truite mouchetée a tantôt la chair blanche,
tantôt la chair saumonée. On a toujours pensé
que cela était dû au fait que certains poissons préfèrent
se nourrir de petits crustacés et se trouvent à
en retenir la pigmentation rouge. Un chercheur vient de découvrir
qu'il y a là bien plus qu'une question de diète...
Pierre Magnan, de l'Université du Québec à
Trois-Rivières, a démontré qu'il existe non
pas une, mais deux formes distinctes de truites mouchetées
dans les lacs du bouclier laurentien. Directeur du Laboratoire
départemental de recherche sur les communautés aquatiques,
Pierre Magnan étudie depuis plus de 20 ans la truite mouchetée
connue aussi sous le nom d'omble de fontaine. Ses travaux montrent
que la truite "pélagique" se retrouve dans les
profondeurs, alors que la truite "littorale", préfère
nager près du rivage, à moins de deux mètres
de fond. Ces truites diffèrent de par leur habitat, leur
morphologie, leur coloration et même leur génétique.
Avec le temps, les deux formes de truites ont développé
des caractères distincts. Il s'agit du phénomène
de polymorphisme, soit la différenciation de l'espèce
à travers le temps due à l'habitat et aux conditions
de survie. Les écologistes du monde entier s'accordent
pour dire que le polymorphisme est plus important qu'on ne le
croyait dans tous les groupes animaux. Cette découverte
pourrait avoir un impact sur les stratégies de conservation
des populations naturelles.
À L'UQAC, UNE PREMIÈRE MONDIALE
EN GÉNIE ÉLECTRIQUE DANS LE CADRE DES TRAVAUX DE
LA CHAIRE CIGELE SUR LE GIVRAGE ATMOSPHÉRIQUE
Le professeur Farzaneh et toute l'équipe de la Chaire industrielle sur le givrage atmosphérique des équipements des réseaux électriques (CIGELE).
Les chercheurs de la Chaire industrielle CRSNG/Hydro-Québec/UQAC (CIGELE) étudient depuis plusieurs années le givrage atmosphérique des équipements des réseaux électriques. Ils ont réussi à développer un modèle mathématique qui permet de prévoir le moment où des arcs électriques peuvent se former sur des isolateurs recouverts de glace et provoquer des pannes de courant. Cet exploit est le fruit de plusieurs travaux de recherche de nature fondamentale effectués durant les 15 dernières années par le professeur Farzaneh, titulaire de la Chaire CIGELE, et plus récemment par quelques membres de son équipe, notamment le Dr Zhang. Grâce à cette découverte, on pense pouvoir accroître la fiabilité du réseau de transport électrique. En effet, si on peut prévoir les pannes, il devient possible de les éviter ! Selon M. Farzaneh, le modèle qui constitue une première au niveau mondial, pourra éventuellement servir à optimiser la conception et la configuration des isolateurs en fonction des conditions réelles d'opération. Cela signifie non seulement que les nouvelles lignes de transport pourraient devenir plus fiables, mais l'approche pourrait également s'appliquer aux lignes actuelles et justifier le coût de remplacement de certains isolateurs là où les risques sont très élevés.
À L'INRS-INSTITUT ARMAND-FRAPPIER, DES CHERCHEURS DU SECTEUR AGROALIMENTAIRE DÉVELOPPENT UNE PELLICULE D'EMBALLAGE BIODÉGRADABLE ET COMESTIBLE
Monique Lacroix et son équipe ont mis au point un produit d'emballage et d'enrobage des aliments entièrement biodégradable et comestible. On l'appelle le " Saran Wrap " de l'avenir. Mme Lacroix concrétise ainsi une prédiction de son défunt époux et collaborateur, le chercheur Marcel Gagnon, fondateur du Centre de recherche en sciences appliquées à l'alimentation de l'Institut Armand-Frappier. Celui-ci avait effectivement annoncé, il y a plus de 20 ans, que l'on en viendrait à manger à la fois l'emballage et l'assiette ! La pellicule que les chercheurs de l'INRS-IAF ont mis au point est constituée de lactosérum, un sous-produit laitier. La membrane de lactosérum possède des qualités remarquables : en plus d'être biodégradable et comestible, elle offre une imperméabilité accrue qui constitue une barrière efÞcace contre les bactéries et l'oxydation des aliments, ce qui augmente considérablement leur durée de conservation. L'entrée de ce produit d'emballage révolutionnaire dans l'industrie agroalimentaire pourrait signifier des aliments plus savoureux et ce plus longtemps, en plus d'avoir des répercussions bénéfiques sur l'environnement.
Source : Le magazine Québec-Science, Février 2000